
Au Cachemire pakistanais, premiers secours et exercices d'évacuation dans les écoles

Ils glissent dans un toboggan d'urgence, sautent de la fenêtre ou transportent un blessé: dans une cour de récréation transformée en camp d'entraînement et de premiers secours, les écoliers du Cachemire pakistanais s'exercent, au cas où la guerre avec l'Inde venait à frapper.
Casque de protection sur la tête et gilet fluorescent sur le dos, Konain Bibi écoute attentivement. Devant elle, des camarades allongés au sol jouent les blessés auxquels des attelles de fortune sont attachées, avant que de petits brancardiers ne les transportent en courant.
"On a appris à aider les autres en cas d'urgence. Avec l'Inde qui nous menace, c'est possible qu'il y ait la guerre, donc il va falloir qu'on se soutienne tous", explique à l'AFP cette collégienne de 13 ans.
Avec plus de 6.000 écoles, collèges et lycées au Cachemire pakistanais, dont un millier le long de la Ligne de contrôle (LoC), la frontière de facto au Cachemire, les autorités locales ont lancé il y a quelques jours les formations aux premiers secours.
- "Aider nos amis" -
Le 22 avril, des hommes armés ont abattu 26 civils sur les contreforts de l'Himalaya, dans la partie de la région à majorité musulmane sous contrôle indien. Depuis, les deux voisins, dont la rivalité a mené à plusieurs guerres depuis leur indépendance en 1947, multiplient menaces et déclarations belliqueuses.
Et les quelques 15 millions de Cachemiris des deux côtés de la LoC se préparent une fois de plus à se mettre à l'abri au cas où les hostilités atteindraient leurs villes et villages.
"En cas d'urgence, les écoles sont les premières touchées, c'est pour cela que nous commençons les entraînements aux évacuations avec les écoliers", explique à l'AFP Abdul Basit Moughal, formateur de la Défense civile.
Le million et demi de Cachemiris vivant le long de la LoC côté pakistanais compte depuis longtemps sur un réseau de bunkers et d'abris de fortune pour se mettre à couvert dans les moments de forte tension.
Mais avec des milliers de soldats lourdement armés dans les vallées et sur les crêtes alentour et une situation qui pourrait dégénérer à tout moment, la Défense civile a déployé les toboggans de secours et autres toiles pour réceptionner des enfants ou leurs professeurs sautant d'une des fenêtres de l'école.
"On apprend à aider nos amis et à donner les premiers secours au cas où l'Inde nous attaquerait", affirme doctement Faizan Ahmed, 12 ans, alors que plus loin des élèves regardent un formateur manier extincteur et sirènes d'alarme.
- "Peur permanente" -
A Muzaffarabad, la grande ville du Cachemire pakistanais, en cinq jours, des formations ont déjà eu lieu dans 13 écoles, assure la Défense civile. Dans les jours à venir, elle déploiera ses hommes dans les établissements bordant la LoC.
Là, au plus près de la ligne de cessez-le-feu de 1949 où des tirs résonnent désormais chaque nuit depuis une semaine, des parents avouent se ronger les sangs pour leurs enfants.
Iftikhar Ahmed Mir, qui tient une échoppe au bazar de Chakothi, un village frontalier, dit "vivre dans la peur permanente", s'inquiétant pour ses trois enfants scolarisés. Le plus petit, lui, reste à la maison.
"On a peur quand nos enfants sont sur la route de l'école parce que cette zone a déjà été visée par l'armée indienne par le passé", dit-il à l'AFP, alors que le Premier ministre indien Narendra Modi à donné son feu vert à une "riposte" militaire à l'attaque au Cachemire.
"J'appelle ma femme régulièrement pour savoir comment ils vont et on surveille qu'ils rentrent directement à la maison après l'école", poursuit ce Pakistanais de 44 ans.
"J'ai passé ma jeunesse dans le conflit et maintenant, malheureusement, mes enfants le vivent aussi".
A.Dupont--PS