
Procès Le Scouarnec: les derniers mots de la défense avant le verdict

Après trois mois de procès, la défense de l'ex-chirurgien pédocriminel Joël Le Scouarnec plaide lundi devant la cour criminelle du Morbihan à Vannes avant d'entendre les derniers mots de l'accusé, qualifié de "diable" par l'avocat général qui a requis 20 ans de réclusion.
"Mon client est archi-coupable", a d'ores et déjà annoncé Me Maxime Tessier, l'un des deux avocats du médecin accusé de violences sexuelles sur 299 personnes, pour la plupart des patients mineurs au moment des faits.
L'avocat général Stéphane Kellenberger a requis vendredi la peine maximale de 20 ans assortie d'une série de mesures de sûreté.
Il a notamment requis une mesure spéciale de "rétention de sûreté", s'appliquant après qu'un condamné a purgé sa peine, "du fait des troubles graves de sa personnalité et de la dangerosité induites par ces troubles en termes de risques très élevés de récidive".
Le magistrat a également demandé que l'accusé soit interdit définitivement d'exercer la médecine ou une autre profession dans le domaine de la santé, et n'ait plus le droit d'exercer auprès de mineurs ni de posséder un animal, en raison de sa zoophilie.
Me Maxime Tessier et Me Thibaud Kurzawa, dont la "bienveillance" a été louée par plusieurs avocats, auront la difficile tâche de mettre en valeur l'humanité de Joël Le Scouarnec, 74 ans, étant les défenseurs "d'un homme et non d'une cause perdue".
Interrogé vendredi sur la façon dont lui et son collègue comptaient défendre leur client, Me Tessier est resté prudent.
Tout au long du procès, Joël Le Scouarnec "s'est montré respectueux de la justice, il est un accusé que l'on souhaiterait plus souvent, je parle ici par l'attitude, certainement pas par rapport à la gravité des faits qu'il reconnaît", a expliqué l'avocat vendredi à la presse. "Et c'est dans cet esprit, encore une fois de respect, d'humanité, que nous, nous plaiderons."
Ils devront démontrer que la reconnaissance de l'intégralité des faits dont il est accusé, moment fort de l'audience du 20 mars, "n'est pas une posture" mais une réelle "évolution" de leur client.
- "Concentré" de perversion -
Ainsi, les deux avocats plaideront peut-être que Joël Le Scouarnec était aussi un "bon père" selon ses enfants et un "excellent chirurgien" selon ses collègues.
Ils évoqueront éventuellement les affirmations de leur client, qui assure ne plus être pédophile, malgré l'avis contraire des sept psychiatres et psychologues qui ont défilé à la barre.
"Vous êtes le diable", a lancé l'avocat général dans son réquisitoire, estimant que malgré une défense au "travail véritablement extraordinaire", Joël Le Scouarnec était, lui, "resté au milieu du gué", tenant "en suspens (les victimes) par sa parole", croyant "qu'il les contrôle encore".
Masque lisse, traits figés, l'accusé a habitué la cour à n'exprimer que peu d'émotions au cours de ce procès débuté le 24 février.
Lorsqu'il prenait la parole, il a souvent répété les mêmes mots, avec les mêmes intonations, des phrases atones que l'avocat général a imitées vendredi d'un air agacé.
"Je ne suis pas un comédien", s'est défendu Joël Le Scouarnec lorsque l'avocat d'une partie civile lui en faisait le reproche.
Maigre est donc l'espoir qu'il révèle lundi un nouvel aspect de sa personnalité, qualifiée de "concentré" de perversion par un expert psychologue devant la cour.
Avant de rendre son verdict mercredi, la cour devra répondre à 841 questions concernant les 111 viols et 189 agressions sexuelles, a rappelé M. Kellenberger.
"Vous devrez déclarer coupable M. Le Scouarnec", a-t-il demandé. Toute peine en deçà des 20 ans requis "n'aurait aucun sens (...) pour les victimes et l'accusé lui-même".
Arrêté en juin 2017, Joël Le Scouarnec purge actuellement une première peine de 15 ans de prison pour des violences sexuelles sur quatre enfants.
Q.Vincent--PS